Top de la consistance

Manuela Lalic

Exposition | 18 février au 23 mars 2022

Ramené au premier plan avec la Covid-19, le dispositif de fond d’écran, qu’il soit mur de briques, bibliothèque, vue panoramique (…) habille l’espace intérieur durant les vidéoconférences. Cachant l’intimité de la vie domestique en dépersonnalisant nos lieux de vie, ces toiles imprimées en série en Chine et livrées par Amazon, sont devenues le fast-food de l’image. En optant pour les paramètres formels connotés socialement de ces représentations d’espaces, Manuela LALIC dissèque ces caricatures d’espaces de vie.  En cherchant sournoisement la limite entre le 2D et le 3D, construire un espace est de l’ordre de la mise à plat. Comme si, après un crash d’avion, l’attention portée à chaque élément retrouvé, du plus infime au plus imposant, générait une classification, un panorama dont l’objectif ultime n’est pas de construire, mais de reconstruire pour comprendre ce qui s’est passé. En décortiquant les différents états de ces mises en scène du soi ou d’un chez-soi, TOP DE LA CONSISTANCE force l’espace représenté à sa limite matérielle et explore la virtualité des espaces pour en faire une matière sculpturale. En relation avec la composante spécifique de l’espace baigné d’une lumière naturelle, l’image de synthèse et la lumière projetée s’affirmeront au seuil de leur visibilité.

 

 

Démarche artistique

Le travail de Manuela LALIC passe par des gestes simples posés sur des matériaux et objets «pauvres» (tordre un trombone, faire un nœud dans un sac de plastique). En construisant une matérialité en ambivalence entre ce qui est artificiel et naturel, l’instable, le périssable, le dégradé, le sale se juxtapose au raffiné, au détaillé, au séduisant. À partir de la manipulation d’objets et-ou d’images et des accumulations qui en découlent, elle élabore des mises en scène évoquant nos«moments collectifs» (pique-nique, mariage, réunion  universitaire) en détournant les gestes, les objets, l’organisation de l’espace associés à ces rituels et conventions, à ces manières «d’être ensemble». Son intérêt pour les comportements de masse questionne le fonctionnement de notre société capitaliste qui préfabrique et standardise nos désirs et nos besoins.

 

En observant les tensions propres à son bagage culturel franco-serbe de Canadienne et les tensions entre ses différents états identitaires, lesquels sont également liés à des appartenances rurales, urbaines ou cosmopolites, elle interroge le lien reliant l’individu à sa collectivité, thème récurrent dans sa pratique. Le sentiment d’appartenance avec l’attachement à son pays natal et à ces racines l’intéresse tout autant que la part de détermination et de contrôle que l’on peut en avoir. Dans ce sens, comme sculpteure et performeuse, elle a une position d’observatrice : choisir ce que je relativise, valorise, caricature en me positionnant face à ces multiples appartenances culturelles. Elle piste des points de tensions entre les différents états identitaires pour les forcer, avec humour, à un dialogue au patriotisme décalé.

Biographie

D’origine franco-serbe, Manuela LALIC vit et travaille à Montréal depuis 1997. Son travail a été présenté au Canada, aux États-Unis, en Europe, en Asie et en Afrique. Ses partis pris artistiques l’ont menée à faire plusieurs résidences à l’international notamment à New York (résidence du Conseil des Arts du Canada-International Studio and Curatorial Program, 2009), au Rajasthan, en Inde (Sandarbh Artist Residency, 2013/2014) et à Yaoundé, Cameroun (courte résidence dans le cadre de la Biennale Ravy, 2016). Actuellement, elle prépare une exposition duo avec l’artiste Victor Piverno qui aura lieu au Centro de Desarrollo de las Artes Visuales de la Havane, Cuba en 2022.

Collaboration vidéographique

Catherine Béliveau

 

Engagée dans une démarche de spatialisation du dessin en mouvement par la projection vidéo in situ, sa recherche sur les espaces en transformation et l’hybridation de matérialités physiques et numériques en arts visuels s’étend aussi aux environnements scéniques en travaillant parallèlement à une pratique de conception vidéo pour la scène, tant au théâtre qu’à l’opéra. Catherine Béliveau est chargée de cours à l’UQAM et à l’Université de Montréal en imagerie de synthèse, dessin et multiprojection.

Remerciements

L’artiste tient à remercier le Conseil des arts du Canada pour son soutien.