Jonathan DESJARLAIS et Jeannot RIOUX | [NO. 29] EN CINQ TEMPS | Installation photographie
Image : Juste avant la dérive, 2018

[NO. 29] EN CINQ TEMPS | Installation photographique

Jonathan DESJARLAIS et Jeannot RIOUX | Provenance : Gaspé, Québec

EXPOSITION | EXTRA-MUROS | 14 FÉVRIER / 31 MARS | Percé

Pavillon des Grandes Marées | 199, route 132 Ouest, QC, Percé, G0C 2L0 | Visible 24 h/24

TEASER DESJARLAIS RIOUX 28 sec GIF

Présentée par le Bureau Satellite Vaste et Vague à Percé et la Maison de la culture de Grande-Rivière, l’installation [NO. 29] EN CINQ TEMPS, combine le travail de l’artiste en art nature Jeannot RIOUX et la pratique de light painting du photographe numérique Jonathan DESJARLAIS. L’un crée d’imposantes œuvres éphémères sur neige avec des milliers de pas en raquette, l’autre combine la superposition d’images et la fixation de la lumière par des temps d’exposition de plusieurs minutes, pour documenter l’œuvre. Ensemble, ils présentent dans des boîtiers rétroéclairés, un corpus d’images réalisé dans 5 lieux différents du Grand Percé.

PROCESSUS CRÉATIF

Lorsque vient le temps de réaliser un nouveau projet d’art nature éphémère en contexte hivernal, Jeannot RIOUX choisit minutieusement le lieu et le moment où il s’exécutera. Il évalue les conditions climatiques, le mouvement des marées, la présence de glace, la luminosité de la lune et des étoiles et le temps d’exécution, avant d’établir ses choix. Le plus souvent, c’est en bordure de mer ou sur un plan d’eau gelé qu’il crée des œuvres aux dimensions imposantes, à la manière d’un agroglyphe, mais à partir de milliers d’empreintes de pas de raquette dans la neige, savamment calculés. L’œuvre existe quelques jours, voire seulement quelques heures, avant que la nature efface les traces de son passage.

 

En association avec le photographe numérique Jonathan DESJARLAIS, une documentation visuelle s’effectue au moyen d’une technique nommée light painting (peinture à la lumière). De fait, l’œuvre est photographiée plusieurs fois, tantôt éclairée par la lumière naturelle des lieux, tantôt en équipe à l’aide d’une puissante lampe de poche, une section à la fois. Ce procédé photographique, réalisé de nuit, combine donc la superposition d’images et la fixation de la lumière par des temps d’exposition de plusieurs minutes.

Jonathan DESJARLAIS Jeannot Rioux Fabrique Culturelle 18-04-11

VIDÉO | La Fabrique culturelle

Télé-Québec Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine

BIOGRAPHIE | Jonathan DESJARLAIS

 

Né en 1985, Jonathan DESJARLAIS obtient un diplôme en Arts et technologie des médias en Télévision option Post-production au Cégep de Jonquière en 2005.

 

Il développe son expertise professionnelle dans le domaine des technologies de l’image numérique par le cumul de nombreux contrats en photographie et vidéo : événementiel, commercial, publicitaire et corporatif. Parmi ses clients, notons entre autres, LM Wind Power, la Société des Arts technologiques et le musée des Beaux-Arts de Montréal. Il peaufine ses compétences en assistant divers photographes professionnels tels que Claude-Simon Langlois et Stéphane Najman.

 

Il utilise dans sa pratique le photo compositing (photo composite) et le light painting (peinture à la lumière), depuis 2004. Ces techniques photographiques combinent la superposition d’images et la fixation de la lumière par des temps d’exposition allant de quelques secondes à une quinzaine de minutes.

 

Il s’installe à Gaspé à l’automne 2017 et collabore avec Jeannot RIOUX depuis l’hiver 2018.

 

Liens :

desjarlaisphoto.com

facebook.com/desjarlaisphoto

BIOGRAPHIE | Jeannot RIOUX

 

Né à Saint-Gabriel-de-Rameau, l’un des villages fermés de l’arrière-pays gaspésien, Jeannot Rioux a grandi à Grande-Rivière avant de s’établir à Gaspé.

 

Il fait carrière au sein de la fonction publique fédérale pendant plus de trente ans et prend sa retraite en 2012. Dès lors, il consacre son temps à l’exploration de différentes disciplines artistiques. En 2013, il participe à un atelier de création en photographie numérique offerte par l’École internationale d’été de Percé de l’Université Laval, élément déclencheur de sa pratique actuelle. Interpellé par les rapports entre la nature et la culture, il pousse ses recherches en art nature (land art) et réalise ses premières œuvres la même année.

 

Il affectionne la production de dessins éphémères en contexte hivernal sur couvert de glace ou en bordure de mer. À ce jour, il a produit près d’une trentaine d’œuvres aux dimensions imposantes à partir de milliers d’empreintes de pas en raquette.

 

En 2018, La Fabrique culturelle de Télé-Québec consacre l’une de ses capsules à son projet intitulé Juste avant la dérive, une collaboration avec le photographe numérique Jonathan DESJARLAIS.

 

Lien :

facebook.com/jriouxphoto

EN COMPLÉMENT…

Les marches blanches

par Claire MOEDER

 

Tu courais le jour, je fixais la nuit. Mes yeux assemblés à tes pieds, aux abords des boisés, quand tous les arbres sont gris. Dans la trame en noir et blanc de l’hiver, nous avons coïncidé. En cinq temps, nous avons été réunis par les cercles sans sorcières, et les temps sont devenus lumière.

 

Tu avais tout pointé, énuméré, tracé. L’œuvre calculée voulait rester cachée dans le recto verso des lignes de ton carnet. Personne ne l’a vue. Puis, tu as dessiné une géométrie, une deuxième, une troisième, à la rencontre d’un horizon. Tu as marché en cercles, des milliers de pas. Tes pieds enroulent les lignes de vie, à quelques mètres du boisé. Ils t’éloignent de chez toi et te font revenir à ton point de départ. Tu ne comptes plus les heures et tu comptes les pas. Tu as tapé l’hiver sur le sol, en cadence blanche et craquante. Sur la ligne, rien ne dépasse. Personne ne t’a vu.

 

Tu as marché ton boutte.

 

J’arrive dans l’après, lorsque le temps passe ta foulée. Il est tard, je suis à contretemps. L’heure bleue s’épaissit et j’entre dans le noir, contre tes cercles blancs. Je me mets face à eux, à rebours de tes pas. Tu me regardes faire le tour : devant moi, la clairière, le marais, la surface ouverte en formes patientes et exaltées, entament une danse jamais vagabonde. C’est mon heure, celle des images fixes après les mouvements. Je compte à l’envers, je photographie en sens antihoraire. J’y perds le fil des heures déroulées en boucle sous le ciel, enroulées dans l’obscurité. Un brin provocateur, le sourire en demi-coin, tu me montres le sens de la marche : tu vas toujours contre le vent et contre le temps. Le temps, fidèle à lui-même, me dis-tu, a fait son boutte, et fuit en sens horaire.

 

Tu retournes dans ton dessin.

 

Tu places à nouveau tes pas, lumineux cette fois. Tu empruntes à nouveau les chemins silencieux du jour. Tu prends un deuxième souffle, lances tes pas à la course. Ils ressurgissent alors de l’ombre, en lucioles hivernales. Toi avec elles, effacez les bruits et tout ce qui fuit. La trace que tu laisses est un doublon de silence, là où tout est tu.

 

Au bout du souffle, il ne reste que moi, pas trop loin de toi. À te regarder dans mon œil de verre, à capter les mouvements de lumière. À l’affut, j’ai des secondes dans les yeux qui t’entourent et te pistent. Je perds soudain l’échelle du temps, je défais l’instant, je ne photographie plus que les lenteurs devenues sans heure. L’œil devient prioritaire et le sol se libère de chacun des pas. Je voulais que cela soit secret et visible à la fois. Pour que de tes pieds tout persiste, comme dans tes mains et ton carnet. Que dans la nuit rien ne résiste, et que l’œuvre se crée à nouveau. Demain, le vent la limera, la neige la reprendra. Tu recommenceras. Tu entreras dans le paysage, tu referas le jour et déferas la nuit. Par le même point d’entrée, toujours. Je serai là encore, un deuxième souffle dans l’heure bleue, la deuxième course sur l’autre versant de la création.

 

Maintenant, tu laisses de la place à la nuit.

 

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Claire Moeder est auteure et commissaire. Depuis 2014, ses projets d’exposition et d’écriture sont dédiés aux usages actuels de l’image et conçus dans un esprit d’étroite collaboration avec les artistes.

Ce projet est une réalisation du Bureau satellite Vaste et Vague à Percé, avec la participation financière de Culture et Communications Québec, la MRC du Rocher-Percé, la Maison de la Culture de Grande-Rivière et Québecor, ainsi qu’avec le soutien de ses partenaires : la Ville de Percé et le Festi-Neige de Percé. Merci à nos commanditaires : Lamijac et Loutres Kombucha.